رسالة من جيل فيرن الى بيير-جيل هيتزل

1866

Parbleu, mon cher maître, j’avais besoin de votre lettre pour me fouetter le sang ! Cela m’a mis tout en rumeur. Vous avez bien fait de m’écrire cela. Cependant, je me hâte de vous dire : soyez certain que l’intérêt ne baissera pas. Seulement, au sortir des événements dramatiques qui signalent la fin du premier volume, je dois retomber dans un calme relatif. C’est même nécessaire, mais cela ne durera pas.

Accordé que je suis une bête qui me [sic] flanque des éloges à moi-même [sic] par la bouche de mes [sic] personnages. Je vais à cet endroit leur clore le bec de la bonne façon.

Quant aux négligences de style, j’en ai reconnu, et de fortes, mais elles étaient déjà réparées sur les placards que j’ai en mains. (Une parenthèse ici, mon cher hetzel. Je ne m’arrange point du tout pout que vous ne lisiez pas sur ma copie. Au contraire. Je vous avais fait une belle copie bien propre. Mais vous avez trouvé l’écriture trop fine, il a donc fallu faire composer. Toute la première partie du second volume est ainsi, mais la seconde est écrite en demi-gros, exprès pour vous).

Je vous prie donc de croire qu’au fond, cet ouvrage-là dans la forme surtout sera beaucoup plus soigné que les autres. De cela je vous réponds. Voyez le premier volume, et certainement les autres ne lui seront point inférieurs.

J’arrive maintenant à la chose la plus grave. Je suis très maladroit à exprimer des sentiments d’amour. Ce mot-là seul « amour » m’efraye à écrire. Je sens parfaitement ma gaucherie, et je me tortille pour n’arriver à rien. Aussi, pour esquiver la difficulté, je compte être très sobre de ces scènes. Vous me demandez de mettre un mot du cœur en passant ! Rien que cela ! Mais il ne me vient pas, ce mot du cœur, sans quoi, il y serait depuis longtemps !

Enfin, nous en causerons lundi, je ne suis pas sorti aujourd’hui, et j’ai travaillé toute la journée. Aussi, je vous écris de bonne humeur, quoique ayant un gargarisme de nature différente, où vous savez.

A lundi, mon cher maître, j’irai vous emprunter des mots du cœur.

Vous êtes assez riche pour ne prêter

A votre très, très, très dévoué

Jules Verne

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